On le sait depuis des années, le Reggae n’est plus réservé à une certaine couleur de peau ou une nationalité. Ayant toujours défendu un message universel, la culture qu’il représente a largement dépassé les frontières de Jamaïque. Le succès mondial d’Alborosie illustre parfaitement cette redistribution des cartes. Né en Sicile, il rassemble tous les aspects de l’artiste reggae en ascension, une tête d’affiche qu’on s’arrache qui a composé, écrit, joué et produit une succession d’albums remarqués depuis son opus « Soul Pirate » sorti en 2008. Il revient aujourd’hui au niveau où on l’attendait, avec un album « à l’influence dub marquée et des incursions dans le dubstep et l’électro sur certains morceaux », commente son auteur. “C’est une sorte de concept-album » expliquet- il. « Dans la plupart de mes disques, tu trouves forcément du roots, du rub-a-dub, du ska, mais cette fois j’ai cherché plus d’homogénéité. C’est pour moi une nouvelle aventure, dans le texte aussi. Je me suis comme toujours chargé de tout. Le Reggae est une musique sociale alors j’évoque les politiques, l’amour et la revanche, mais avant tout la liberté et le feu (Freedom & Fyah). Tu trouveras ici des chants de liberté mais il te faut traverser le feu parce que certaines personnes nous aiment et pas d’autres. Je ne peux donc pas prétendre que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il faut savoir se battre et c’est ce que je fais dans des morceaux comme Poser. Cette chanson dénonce les hypocrites. Les gens (et je n’ai pas peur de m’inclure) aiment donner une bonne image mais s’il on y regarde à deux fois, ils sont loin d’être irréprochables. Nous sommes humains, faisons tous des erreurs, la vie est ainsi faite. » Poser, sorti en 1er single, est une des bombes de l’album. L’autre hit est Rocky Road qu’on trouve ici dans une version différente du single. Dans le clip, Alborosie apparaît en vieil homme à la barbe grise, regardant le film de sa propre vie, enfant, adolescent puis jeune homme avant de voir apparaître fils et petit-fils à l’image. Le message est profond, faussement espiègle abordant la question fondamentale de la vie et la mort. Il livre ici des morceaux roots aux lyrics Rasta sans concession avec Can’t Cool et Judgement et Cry, qui fustigent les gunmen qui ont fait de Kingston un champs de bataille. Sur Rich, il rappelle que l’argent ne fait pas le bonheur et nous ramène dans les 80’s sur Everything quand les riddims des Roots Radics régnaient sur les dancehalls. Travaillant dans son propre studio (Schengen Studio) à Kingston, aux pieds des montagnes, il utilise un équipement vintage analogique autant que les dernières technologies. Alborosie excelle quand il s’agit de redonner vie au old school – pas en copiant ce qui a déjà été fait mais en le remettant au goût du jour. Il l’a prouvé avec succès par le passé et est maintenant reconnu pour ce savoir-faire. Cela n’a pas toujours été le cas. Quand ses morceaux ont atteint le sommet des charts, les promoteurs locaux ont pris un malin plaisir à dire que ce reggae authentique était avant tout pour le public européen. l’Histoire a montré le contraire et le succès de Jamaïcains comme Chronixx ou Protoje prouve que le roots est redevenu populaire. “Pupa Albo” est malgré lui le pionnier du mouvement aujourd’hui appelé « Reggae Revival ». Il invite d’ailleurs Protoje sur Strolling, qui s’apparente pour Alborosie à un reggae-western. “J’ai connu Protoje bien avant que son nom circule, d’ailleurs tous les gens avec qui je travaille sont des frères, il y a une relation privilégiée entre nous. C’est aussi le cas pour Ky-mani Marley qui occupe une place prépondérante dans l’album. Il est venu au Gee Jam Studio quand j’y travaillais et la vibe est tout de suite passée. Il est enfant de la Musique et la musique est aussi en moi, collaborer a été d’une facilité étonnante”. Ky-mani et Protoje sont deux artistes majeurs mais Alborosie sait mettre de jeunes talents à l’honneur. C’est le cas avec Sandy Smith, une des choristes d’Albo qui a connu le succès avec leur duo No Joking Thing (2013). “J’adore sa voix » dit-il. « Nous chantons ici ensemble sur Carry On et ça match parfaitement. Elle est superbe et très sensuelle, j’aurai pu faire un single-radio mais j’ai décidé de la mettre sur un gros dub militant car après tout c’est comme ça je conçois cette musique, c’est une mission. Nous la faisons pour aider les gens à créer un environnement meilleur. Reggae-music est comme un livre – un livre de vie – duquel nous devons nous inspirer. » Son autre invitée-surprise est aussi jamaïcaine et peu la connaissent en dehors du cercle d’Alborosie. “Elle s’appelle Sugus et a une voix incroyable, il fallait que je l’enregistre ! Elle est pour moi la version féminine d’Horace Andy. Elle chante depuis longtemps et a posé des choeurs dans les 70’s avec Dennis Brown ou Gregory Isaacs. She’s an elder, y ‘know? C’est en fait la grand-mère de ma petite amie, mais elle a le timbre que je recherchais”. Sugus apparait sur Zion Youth – chant de ralliement pour tous les combattants Rastas d’aujourd’hui – et également sur Fly 420 – parfaite fusion entre reggae classique et dub-step. Depuis 2001 et son installation sur l’île, Alborosie n’a jamais autant voyagé. C’est dès la sortie de ses premiers hits Kingston Town et Herbalist que l’artiste a gagné la reconnaissance de ses pères, mais son aura n’a cessé de se développer depuis sa signature chez VP Records / Greensleeves en 2009, leur livrant le cultissime album « Escape From Babylon ». Le visuel le montrait guidant les musiciens du monde entier, les arrachant aux ruines du monde moderne, à la manière d’un Moïse guidant le peuple à la Terre Promise. Huit ans plus tard, on retrouve cette même vision dans les mots du prêcheur jamaïcain le Reverend Rohan Treleven déclamant un vrai manifeste en introduction de l’album Freedom & Fyah : “La musique est en toi” scande-t-il. “Tu vas parler à ta génération mais grâce aux mots du Dieu vivant, tes mots seront à la gloire de Dieu et tu feras en sorte de construire et d’unifier l’Humanité”. De tels mots conviennent parfaitement à Alborosie, ajoutez à cela la Promesse – énoncée par une voix semblant venir de l’au-delà – « tu trouveras ta place et sera une bénédiction pour le peuple » (“You will take your place and be a blessing to your generation.”)
Tarif & Réservation
Tarif Unique : 38 €
Site internet : http://festival-insolent.com